EARL de Bréhardec à Questembert . Enquête publique concernant le projet d'extension-restructuration d'un élevage porcin.

Publié le par assoc elementerre

LA POSITION D'ELEMENTERRE


Enquête publique

concernant le projet d'extension-restructuration d'un élevage porcin , EARL de Bréhardec à Questembert

 

 

Habitants et citoyens de Questembert et de la Communauté de Communes de Questembert, nous nous sentons concernés et interpellés par le projet d'extension / restructuration de l'EARL de Bréhardec.
Concernés et interpellés, car après lecture attentive du dossier déposé en mairie il nous apparaît que le projet présenté ne répond pas autant qu'il l'affirme à un certain nombre de conditions d'acceptabilité.

 

Certes :

Nous ne remettons pas en question la bonne foi des porteurs du projet;

Nous ne remettons pas en question leur volonté d'entreprendre et de produire;

Nous constatons également que l'appel fait pour étayer le dossier à diverses sociétés ayant pignon sur rue peut paraître de nature à apporter les cautions les plus opportunes susceptibles de convaincre du sérieux de la démarche…

Les divers éléments de la réglementation qui doivent être pris en compte dans ce type d'installation semblent a priori identifiés et traités par les conseils que les porteurs du projet ont sollicités. Personne n'imaginerait qu'un cabinet d'études de la société Sanders Bretagne ou que le Groupement de producteurs de l'Armorique, ou encore la Cogedis ne soient pas parfaitement rodés à nourrir et argumenter de tels projets (La comparaison de divers projets ayant reçu leur appui ferait sans doute apparaître une bonne part de "copier-coller" dans les argumentaires proposés…).

 

Toutefois, nous nous permettons de questionner fortement  un certain nombre d'hypothèses, d'arguments et de conclusions qui alimentent le dossier.

Il est écrit dans la synthèse du projet présentée en introduction :

"que l'EARL  de Bréhardec, est une exploitation à caractère familial… "

"qu'elle  a besoin de ce projet pour assurer la pérennité de l'entreprise…"

qu'il s'agit d'une "extension - restructuration"

-     "que les diverses solutions techniques choisies pour "réduire/compenser" les risques sont les mieux adaptées,  techniquement les plus fiables et économiquement les plus supportables…"

 

Nous questionnerons ces hypothèses et arguments sous trois angles :

social,

environnemental / sanitaire,

économique...

 

Risque social:

 

Peut-on considérer :

● qu'une entreprise faisant travailler 4 et potentiellement 5 actifs est encore une entreprise "familiale" ?

● que reprendre les moyens de produire ( = les droits à épandage ) de 4  exploitations familiales cessant leur activité peut-être analysé comme un moyen de maintenir l'emploi agricole ?

[En outre de quel type d'emploi s'agit-il ? Comment faut-il caractériser les liens de dépendance induits de facto ou contractuellement vis à vis du fournisseur exclusif d'aliments, la firme Sanders? Cela fait plus de 40 ans que bon nombre d'agriculteurs/éleveurs dénoncent cette forme d'intégration  qui fait des exploitants de simple "façonniers"  ou sous-traitants soumis sans pouvoir de négociation - en amont - aux contraintes et impératifs de leur fournisseur d'aliments ? et - en aval - aux contraintes de marché et de prix que leur impose leur acheteur  exclusif ?]

● que le "rapatriement"  ( c' est à dire la" délocalisation") depuis Bignan, Lanvaudan, St Jean de Brévelay, Guénin ! …est de nature à "relocaliser" l'économie" ?

● que la volonté de "pérenniser" l'entreprise puisse s'argumenter d' un accroissement de 44% du nombre d'animaux ( de 4890 actuels à 7018 prévus), d' un investissement énorme de plus de 1 600 000 €, de l'installation de moyens techniques extrêmement coûteux à l'achat et à l'usage…, bref d'un capital social et d'un coût de fonctionnement exorbitant ? N'y a t-il pas confusion entre pérennisation et accroissement, et cet accroissement n'est-il pas plutôt un handicap qu'une chance ?

● que l'industrialisation de la production agricole - en l'occurrence ici le développement de l'élevage intensif hors-sol (*)de porcs , car c'est de cela qu'il s'agit - est de nature à maintenir (ou rétablir ) le "tissu agricole" ?

► (*) Notons ici que les critères d'exploitation  de type familial, c'est à dire à "taille humaine", de  transmissibilité de l'exploitation, de pérennité de  celle-ci , de lien au sol, de maintien du tissu agricole… sont précisément liés  et que le projet s'éloigne massivement de ces critères…en développant au contraire le "hors-sol" , c'est à dire  la production d'animaux dans une exploitation qui ne dispose pas des surfaces nécessaires pour assurer tout ou partie de leur alimentation et tout ou partie de l'épandage de leurs déjections…L'importance du lien au sol est ici fondamental, car seul il permet de fertiliser naturellement les sols en évitant les intrants afin de nourrir les cultures et donc de produire les aliments nécessaires à l'élevage des animaux. Le compost à base de paille, de fumier  - et non le lisier - est seul en mesure de maintenir le taux d'humus dans les sols et de favoriser la vie microbienne… Ce lien au sol est également fondamental pour garder des territoires habités, une campagne  vivante, des exploitations de taille aisément transmissible…et pour restituer au sol précisément ce dont il a besoin pour nourrir les plantes et, à travers elles, les animaux.

► Or la question de l'excès de production de déchets est au cœur des questions environnementales et sanitaires de la région !

 

 

 

Risque environnemental et sanitaire :

 

Toute la réglementation sur l'eau et les pollutions qui la justifient ont amené à identifier des "ZES" (Zones d'excédents structurels) pour "résorber" / "réduire" les excédents d'azote. Est-ce que le projet soumis à enquête publique s'apparente à une résorption/ réduction ?

Manifestement  non :

Le dossier comporte certes tout un argumentaire de parade. Sous le titre "environnement et mesures envisagées pour supprimer/ limiter/ compenser les effets prévisibles",  on évoque en effet diverses mesures  pour réduire  les nuisances et pollutions…Mais derrière le mot "réduire"  se cache  une série de moyens qui auront moins pour effet de réduire que de  répartir /diversifier/ donner une autre forme à ces nuisances et pollutions.

 

Voyons plus précisément:

● Les porteurs du projet , on l'a vu, comptent "rapatrier" des droits d'épandage libérés ailleurs (Bignan, Lanvaudan, St Jean de Brévelay, Guénin) par des cessations d'activité;

● Ils envisagent également de  procéder  à des "délocalisations" de leurs droits à épandre sur les communes voisines qui échappent au classement en ZES ( Muzillac…);

● Ils comptent sur la mise en place d'une technique de résorption artificielle sous forme de traitement des lisiers par un procédé de séchage ( "procédé techno one"), complété par la commercialisation du produit obtenu .

 

Au total,  aucun de ces moyens envisagés ne  permettra d'opérer autre chose qu'une nouvelle répartition géographique des excédents produits sur l'exploitation. On ne peut donc parler ici de "résorption" !,

D'autre part, concernant la part des déchets (le lisier) restant à épandre, on reste dubitatifs - puisqu'il n'y a pas de contrôle ( ce que dénonce encore la Commission Européenne par lettre du 25 avril 2009)) - que les droits à épandage acquis par convention sur des terres situées à plusieurs kilomètres sur le territoire d'autres communes  vont - au-delà d'une description formelle sur le papier - être réellement respectées ? Au mieux, si ces contraintes étaient respectées, quel en serait le coût en termes de transport, de nuisances, de dépense énergétique ?

La lettre de la CE (avril 2009) relève notamment plusieurs manquements à la directive nitrates ( périodes d'interdictions d'épandage inappropriées, défaut de mise en oeuvre d'une fertilisation équilibrée,  sous-estimation en France des normes de rejet d'azote pour les animaux, absence - hors des ZAC (Zones d'Actions Complémentaires = têtes de bassin versant en amont des prises d'eau potable ) et des zones en contentieux.. - d'un seuil absolu d'apports azotés toutes origines confondues…).

 

Concernant le plan d'épandage , nous relevons dans le dossier seulement 4 analyses de sols  - d'ailleurs non clairement localisées et datant de 2006 - sur une trentaine d'îlots. Ces analyses partielles font apparaître qu'ils sont suffisamment pourvus en phosphore et potassium… Puisque le lisier est riche en potassium et phosphore, la logique serait de ne pas en rajouter sur les parcelles emblavées…pour rester dans une logique de fertilisation équilibrée ! L'apport continu de potassium sur des sols suffisamment pourvus risque de compromettre l'équilibre argilo-humique.

 

► Nous relevons que le projet compte également, pour réduire les effluents, sur une alimentation dite "biphase" proposée par le fournisseur exclusif  de nourriture animale "Sanders", procédé intéressant et apparemment banal d'adaptation des quantités et qualités de la nourriture à l'âge et aux besoins des animaux …mais en réalité  pas si banal que cela !

De quoi s'agit-il

Les cochons confinés dans un espace restreint (0,65 m2/par cochon) doivent se nourrir dans une auge mécanisée approvisionnée d'une "soupe" faite d'un mixage d'eau, de blé / soja fermenté (nous reviendrons sur le problème du soja: cf. plus loin , § "risque économique")… et autres éléments additionnels demeurant  le secret des firmes d'approvisionnement (telles que Sanders). Les curieux ont, semble-t-il,  pu y déceler des vitamines, des pro-biotiques , des antidépresseurs…sans doute indispensables pour que ce type d' élevage sur caillebotis soit plus intensif et productif…et ne provoque pas trop d'effets secondaires dus au confinement, à la concentration, aux émanations d'ammoniac, etc. (maladies, stress, diarrhées, agressivité…).  La réduction des effluents obtenue par ce système alimentaire n'est donc pas innocente…tant sur le plan sanitaire que nutritionnel (ex. problème de résistance aux antibiotiques chez les humains, en aval..!).

 

 

 

risques sanitaires

 

● que penser du choix fait d'une alimentation totalement importée dont la provenance, les composants, les additifs…sont largement ignorés et incontrôlables ?

● que penser du choix technique du caillebotis ( caillebotis en béton ajouré laissant les déjections tomber directement dans la fosse à lisier située directement au-dessous … avec son lot considérable de risques sanitaires ?)  Même les hollandais qui avaient promu cette technique l'ont largement abandonnée à la suite de la grippe porcine…

On voit bien dans ce projet une démarche sérieuse pour prendre en compte certains des risques environnementaux et sanitaires. Mais on voit bien aussi que ces divers moyens constituent une fuite en avant technologique qui crée autant de problèmes qu'elle n'en résoud, et sans laisser d'espoir de les résoudre en finale car le système de production qui le sous-tend est obsolète . Il génère - sous le couvert de technologies très modernes - des risques d'un nouvel ordre :  plus de dépendance  financière, juridique, technologique, énergétique … plus d'équipements, plus de maintenance, plus  de coûts induits. Et il laisse irrésolu un problème majeur, celui de la pollution de l'eau.

 

► Quelques autres données présentées dans le Chapitre IV  du dossier: "Effets sur l'environnement et mesure envisagées" suggèrent quelques remarques :

 

Impact visuel:

"Ce type de bâtiment d'élevage devient une composante du milieu rural de la région

Et oui, mais doit-on s'en satisfaire ou douter de son bien-fondé ? Une cicatrice sur un visage après un accident est aussi une composante d'un visage…!

"et contribue à montrer le dynamisme économique de notre région"..

Et si le dynamisme de la région passait davantage par un grand nombre de petites structures garantes d'une occupation mieux répartie du territoire rural et induisant des rapports de proximité entre producteurs et consommateurs ?

 

 

 

 

 

 

Bruit

"Cette approche pourra faire l'objet d'une vérification après mise en fonctionnement des installations afin de garantir le résultat recherché"..

L'analyse du risque est absente… et de quelle approche s'agit-il?   quel est le résultat recherché? Quelles garanties seront fournies pour que les risques soient écartés, Quel en sera le coût ?

 

"les bruits les plus importants se produisent hors bâtiments"…

Soit. Ils sont partiellement répertoriés dans un tableau.
Toutefois l'embarquement - qui représente plus d'un transport par semaine - n'est pas mentionné. Quel en est l'incidence acoustique pour le voisinage ?

Ne figurent pas non plus .. les camions d'équarrissage, les transports liés à l'exportation des produits de séchage du lisier, le transport du lisier … (300 rotations/an !)…

Et ces camions, par où passent-ils ? Par le village de Bréhardec? Ou par le village de Keroger? Dans les deux cas qu'en est-il des nuisances sonores?

 

"le nombre de ventilateurs semble n'avoir aucune influence…"

La référence à l'IFIP et à l'UGPVB indiquant une moyenne de 55 dB(A) est contestable sur au moins trois points:

Ces organismes ne sont pas franchement indépendants;

Une moyenne en matière de bruit ne signifie rien: il faut parler de niveau équivalent à un temps T ( T pouvant aller d'une minute à une semaine ou plus…) le niveau équivalent est la somme de tous les bruits fluctuant sur un temps T  ramenée à un niveau stable sur le même temps…

Selon l'IFIP: "très souvent le bruit perçu à 100m ne dépasse pas 43 dB"…

Il s'agit en réalité de la projection d'une  étude réalisée en 1996 et non d'une analyse réalisée sur le site de Bréhardec…

L'étude citée indique une moyenne de 55 dB(A) alors que le début du chapitre note que "la perception" des bruits est difficile à mesurer…!

En réalité pour mesurer le niveau équivalent: il suffit d'avoir un sonomètre intégrateur.

On lit encore que "les bruits de camion seront limités"…

Mais on ne nous dit pas comment ces bruits seront limités…?

 

Paysage

"L'élevage par l'apport régulier d'engrais organiques à dose optimale, contribue à la réussite des cultures: ce qui permet de préserver un paysage rural équilibré"

Le lien fait ici entre "réussite des cultures" et "paysage rural équilibré" devrait nous faire sourire ! Mais s'agit-il d'une plaisanterie ? De quoi parle-on ?

 

Patrimoine culturel

Le projet prétend exercer "un effet positif sur le patrimoine culturel"

Il fallait l'oser ! Rapprocher une installation industrielle d'une esthétique discutable et un ensemble architectural remarquable, comprenant un chapelle du XIII° siècle avec sa fontaine en contrebas et un village très bien préservé, le tout situé non pas à 200 m, comme cela est écrit, mais plutôt à 100 m de l'installation celui du hameau proche, ne  nous paraît pas constituer un apport positif au patrimoine culturel !!!

 

risque économique :

 

Le risque économique du projet mérite également d'être  pris en compte plus sérieusement que ne le fait le dossier :

● Un investissement de 1 653 000 euros sans aucune part d'autofinancement;

● un tel investissement dans un contexte de crise chronique du marché du porc ( = écart persistant entre prix de revient moyen et prix d'achat des grands acheteurs (cf. site "Bretagne-porc breton)… et des perspectives à court et moyen terme sans  aucune visibilité ;

● donc une marge inexistante par delà les frais  engagés (amortissements, frais de maintenance, de fonctionnement,  charges sociales, etc..). En moyenne tendancielle, un kg de viande porcine acheté  1,20 € coûte 70 cts en alimentation, 30 cts en charges structurelles et main d'oeuvre, 20 cts en charges opérationnelles ….Soit une marge résultante = 0 ;

● une contrainte technique majeure liée au procédé de traitement du lisier qui a des chances de ne pas pouvoir être poursuivi longtemps en raison de son coût ;

● une dépendance totale,  pour l'alimentation des animaux, d'un approvisionnement externe avec un seul fournisseur, Sanders, en lieu et place d'une production locale autosuffisante sur les terres de l'exploitation;

● une commercialisation des effluents traités avec, là encore, le risque lié à la dépendance d'un seul acheteur potentiel ;

● la  saturation du marché :  autosuffisance de la France (103%) et de bon nombre des pays européens:  108% d'autosuffisance au plan européen…

 

► Et donc une appréciation complètement inexistante ou illusoire des risques encourus.

 

● Un autre élément du contexte socio-économique d'une économie mondialisée est parallèlement complètement passé sous silence. Peut-on ignorer que la production intensive de soja - souvent génétiquement modifié - et en monoculture, en Amérique latine (par exemple Brésil et Argentine)…

- permet certes d'approvisionner les multinationales - telles Sanders - et de produire ces aliments enrichis en protéines nécessaires aux élevages intensifs et "hors-sol" de la Bretagne et d'ailleurs…

- permet, symétriquement, à ces pays d'exporter leur production agricole et de gagner en échange les devises dont elles ont besoin …

- mais au prix d'un vrai désastre humain, sanitaire, écologique : (déforestation intempestive, élimination criminelle des autochtones qui vivaient jusque là avec quelques hectares d'une agriculture vivrière);

- mais aux dépens de leur autonomie sociale, alimentaire, technologique et de leur lien à la terre…

 

 

 

 

 

 

►►►  Autant de risques cumulés (sociaux, environnementaux et sanitaires, économiques )  laissent penser que ce projet venant s'inscrire dans une conjoncture chronique de surproduction, d'effondrement des prix est pour le moins imprudent,  sinon téméraire ?

 

 

On le voit, par quelque axe qu'on le prenne, ce projet, s'il est mis en œuvre, risque encore de  renforcer un système productif porteur de trop de risques et donc obsolète:

► Parce que le marché du porc est chroniquement excédentaire et qu'un accroissement de la production ne répond pas aux exigences du moment, à la nécessité de réduire la production ;

► parce que , source de nuisances insoutenables tant pour la nature, que pour l'eau,  l'environnement ,  les riverains, les autres acteurs du territoire  et de la vie économique , il ne permet pas de réduire significativement les risques ;

► parce que le principe pollueur-payeur, n'est pas appliqué aux agriculteurs…

 

Que faut-il ajouter pour exprimer nos doutes sur le bien fondé de ce projet?

L'actualité de la crise du monde rural, de l'endettement des producteurs et plus précisément des producteurs qui ont investi massivement  (imprudemment !?) et qui se voient acculés à  demander encore et encore des aides - une contribution complémentaire des contribuables ! - pour assurer  leurs agios, compenser leurs pertes… n' est-elle pas là suffisamment présente pour nous interroger…?

Nous voulons bien "contribuer", mais de manière conditionnelle…

et nous voulons pouvoir plaider pour d'autres voies,  pour d'autres solutions techniques, sociales, environnementales ?

 

Nous avons délibérément concentré nos remarques autour des trois axes qui caractérisent le développement durable ( ou "soutenable") : social, environnemental, économique.

A l'heure où partout, à l'échelon local ( Commune et Communauté de Communes) , Départemental, Régional , National ( Charte du Développement Durable) ces principes sont adoptés, promus mis en action à travers des programmes concrets ; à l'heure du Grenelle de l'environnement et du Grenelle de la mer, il nous apparaît que le projet échappe à l' obligation qui s'impose de chercher d'autres voies.

Nous ne contestons pas le souci, repérable dans la description du projet, que ses porteurs ont de prendre en compte des risques, de prendre en compte des normes que la réglementation exige , mais il ne nous semble pas que ce souci soit allé jusqu'à s'inscrire dans  les changements  d'éclairage, de système  de production, et donc de solutions… que les crises actuelles imposent.

 

Les recherches ne manquent pas, ni les groupements de producteurs et de consommateurs…ni les publications, ni les visites techniques ou voyages d'étude … qui permettent d'envisager d'autres solutions assez radicalement différentes susceptibles de  répondre aux défis d'une agriculture porteuse d'avenir . Nous citerons juste deux trames: celle des "Fermiers de l 'Est" en Alsace, et, en Bretagne, celle que de l'association "Cohérence" - regroupant plus de 120 associations, groupements  de producteurs ..- tente de promouvoir  pour adopter de vraies alternatives.

 

 

 

 

►►►  A ce stade de notre contribution à l'enquête publique, il nous faut rappeler quelques chiffres et données qui nous paraissent essentielles pour cadrer le contexte dans lequel ce projet s'inscrit.

 

● Evolution du nombre des exploitations en Morbihan

20 891 en 1988, 8 350 en 2007 ( soit 60% en moins  de 1988 à 2007)- Source Agreste, 2007

 

● Production d'azote organique d'origine porcine : + 4% de 2000 à 2006

Production de phosphore organique d'origine porcine : + 4% de 2000 à 2006

- Source: Agreste- DRAAF 2006

 

● Le rapport sur le porc breton (source" Bretagne- porc breton") indique que bon nombre de pays européens sont autosuffisants en viande porcine : France, 103% ; Espagne 118 %; Pologne : 121 %; Pays-Bas: 196%; Belgique : 207%; Danemark : 609%. Pour l'ensemble européen la production porcine est autosuffisante à 108%, soit une production excédentaire de 1750 tonnes…

 

● En 2002, un rapport de la Cour des Comptes intitulé "la préservation de la ressource en eau face aux pollutions d'origine agricole": "le cas de la  Bretagne" soulignait des "insuffisances exemplaires" : entre 1994 et 1999, 1/3 des relevés de taux de nitrate dépassait la norme européenne de 50 mg/l. Parmi les conclusions, "le contrôle des épandages inexistants" était retenu comme "le maillon faible des actions de reconquêtes de la qualité de l'eau".

 

● L'office international de l'eau relevait de son côté, entre 2002 et 2005, "une dégradation forte" de 29% des eaux souterraines par les nitrates sur 1242 points de mesure. Le coût de traitement des  nitrates s'élève de 30 à 80 centimes d' € par m3 d'eau pour une consommation moyenne par individu de 530 m3/ an

 

D'autres rapports récents soulignent l'actualité préoccupante de ces problèmes :

CSEB (Conseil scientifique de l'Environnement de Bretagne): rapport "Algues vertes"… 24-09-09 :

● Le cheptel animal élevé en Bretagne produit 62 000 tonnes de phosphore, soit l'équivalent  de la production humaine  comprise entre 40 et 45 millions d'habitants. On estime que 70 % du phosphore qui circule dans le réseau hydrographique breton  est d'origine agricole . On rappelle également que - pour l'ensemble des bassins bretons - le flux d'azote allant à la mer est de l'ordre de 75 000 tonnes/an en année climatique moyenne.

● Les références géographiques et historiques mondiales dont on dispose sur le fonctionnement normal d'un bassin versant établissent qu'un flux spécifique de nitrates sans conséquences environnementales néfastes et de l'ordre de 5kg/ha/an, et en tout état de cause inférieur à 10 kg/ha/an alors que les fuites d'azote des bassins versants bretons sont en moyenne  supérieures de 3 à 5 fois à cette  norme…

● La directive européenne 91/271/CEE définit l'eutrophisation comme "l'enrichissement de l'eau en éléments nutritifs, notamment des composés de l'azote et/ou du phosphore, provoquant un développement accéléré des algues et des végétaux d'espèces supérieures qui entraîne une perturbation indésirable de l'équilibre des organismes présents dans l'eau et une dégradation de la qualité de l'eau…"

Pour résoudre ces effets, diverses directives européennes imposent aux états membres notamment de désigner des "zones sensibles".. et des "zones vulnérables"…

● La recrudescence du contentieux français et européen constitue un révélateur préoccupant du respect insuffisant du droit de l'eau et des installations classées. Différents rapports publics nationaux et européens dénoncent ces insuffisances.. Par trois fois la France a été condamnée par la cour de justice européenne pour manquement  aux obligations dans le domaine de l'eau en Bretagne, notamment le non respect de la norme "nitrates"…, le non respect de désignation de zones sensibles à l'eutrophisation  telles la baie de Vilaine, le Golfe du Morbihan…
● Le Grenelle de l'environnement par sa loi de programmation (3/8/2009) engage l'état à mettre en place l'agriculture biologique  à hauteur de 6%  en 2012 et 20% en 2020;  et le Grenelle de la mer fixe un objectif de réduction de 40% de tous les flux de nutriments provenant des bassins situés en zone vulnérable pour la période 2012-2014 - source CSEB sept 2009 -.

● Les dommages économiques subis par la Bretagne du fait du non respect ou du respect insuffisant de toutes les mesures prescrites ont pu être chiffrés : le montant cumulé des aides publiques investies en Bretagne depuis 1991  pour la maîtrise des pollutions d'origine agricole est proche du milliard d'euros.

(Source CSTB sept 2009 , p. 10).

Le même rapport cite les principaux éléments responsables de cet état de fait:

-  inadéquation des normes environnementales en matière d'épandage d'azote et de rejets d'azote par les animaux; compte non tenu des apports d'azote d'origine minérale; absence d'une limite quantifiée d'apports azotés toutes origines confondues; plafonds de fertlisation…

- contrôle inefficace des déclarations annuelles  et plans d'épandage;

- non application du principe pollueur-payeur avec les effets pervers induits ( recours systématique aux aides publiques… et financement par les contribuables et consommateurs des mises aux normes successives)…- sources CSEB sept 2009 -

 

● menace réitérée de développement d'un nouveau cocktail génétique de plusieurs souches de virus de grippe ( porcine, aviaire, humaine) lié au développement de grandes fermes d'élevage industriel, ..foyers idéaux  d'émergence de ce cocktail…"Against the GRAIN" un système alimentaire qui tue : la peste porcine, dernier fléau de l'industrie de la viande"; Mexique. Avril 2009 - http://www.grain.org. avril 2009

 

 

 

 

 

 

Le 28 octobre 2009 ;

 

"Elémenterre", association de défense de l'environnement et du cadre de vie,

adhérente à "Eaux et Rivières de Bretagne, et au réseau "Cohérence"


"La Marmite"  association de mise en réseau et d'accompagnement de porteurs de projets en milieu rural.


 

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